La Civilité marchande
01 mars 2017
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18 p. / p. 24-41
Non réductible à l'échange neutre de biens envisagé par les économistes, la relation marchande se caractérise non seulement par l'inégalité d'information, mais aussi par une modalité spécifique de rapport à l'intérêt. L'alternative entre les extrêmes - apologie des qualités professionnelles de loyauté et de compétence/dénonciation du cynisme mercantile - contribue à occulter les conditions et les modalités de la reconnaissance sociale des pratiques objectivement (sinon subjectivement) intéressées. Si le sociologue peut être tenté à juste titre par la position tenue pour la plus démystificatrice, il doit chercher à élucider la question de la forme spécifique d'efficacité symbolique de pratiques ouvertement définies par la référence à l'intérêt : comment un acte (ouvertement) intéressé est-il possible ? La civilité marchande constitue un ensemble de rituels et de techniques permettant de transfigurer la violence des rapports d'échange en un accord loyal entre des individus raisonnables. Elle constitue par là un instrument symbolique essentiel d'intégration et de présentation de soi du groupe professionnel des vendeurs. Il s'agit d'un modèle idéal qui peut être étudié là où il est le plus apparent, à savoir dans le travail de formation des vendeurs.