En 1914, Stravinski est plus que jamais occupé par la Russie primitive et ses traditions. Il s'attèle ainsi, jusqu'en 1923, à la composition des Noces, qu'il destine aux Ballets russes. Ces 'scènes chorégraphiques avec chant et musique' représentent, en quatre tableaux, une cérémonie de mariage de la Russie paysanne. La musique de Stravinski conjugue brutalité rythmique et force incantatoire, rappelant le caractère à la fois éternel et inexorable du cérémonial nuptial. L'oeuvre connut plusieurs essais d'instrumentations différentes. Mathieu Romano, l'Ensemble Aedes et Les Siècles enregistrent ici pour la première fois l'intégralité de la version 1919 (achevée en 2007 par Theo Verbey), destinée à un ensemble mêlant percussions, cymbalums hongrois, harmonium, pianola et voix. Claire, mordante, découpée, cette instrumentation inouïe est transposée au Boléro de Ravel par Robin Melchior, dans une version inattendue qui, par sa suavité, se révèle une totale réussite.

Un héros antique, un dragon, une jeune déesse : l'amour et la gloire sont au coeur du premier opéra de Lully, représenté pour la première fois devant Louis XIV. Comme dans ses oeuvres précédentes - divertissements, ballets de cour et comédies-ballets - Lully fait pétiller les voix et l'orchestre, multipliant les morceaux qui se distinguent et qui plaisent à la cour. Mais avec l'aide du librettiste Philippe Quinault, il introduit la force dramatique de la tragédie classique française dans une oeuvre exclusivement musicale : et là, le public est envoûté par les histoires d'amour mythiques si somptueusement dépeintes. Les premiers héros tragiques, les premiers grands duos d'amour, les premières larmes du public : la tragédie-lyrique, cet opéra à la française, est née, et grâce à elle, jusqu'à sa mort en 1687, Lully ne cessera de ravir. Vincent Dumestre ressuscite avec brio cette oeuvre phare, célébrant ainsi dignement les trois cent cinquante ans de l'Académie royale de musique !