Robert Musil a renoncé à une carrière universitaire pour se consacrer à l'écriture. Observateur lucide de l'effondrement de l'Empire austro-hongrois et des bouleversements opérés par la Première Guerre mondiale et la montée en force des totalitarismes, il a trouvé dans l'ironie et la philosophie de l'essayisme des angles d'approche adaptés à la complexité de son époque. Le laboratoire expérimental de la littérature lui a permis d'imaginer de nouvelles possibilités éthiques et d'explorer le royaume méconnu des émotions, notamment à travers l'amour de l'homme sans qualités pour sa soeur Agathe, amour «aux confins du possible» où l'attrait de l'interdit se pare d'un rayonnement mythique.

A travers l'étude de l'oeuvre musilienne sous l'angle de la question anthropologique, on voit se dessiner la figure d'un écrivain très attentif aux controverses idéologiques ainsi qu'à l'évolution politique de l'Europe des années vingt et trente. la réponse de Musil à ce qu'il perçoit comme un crise de l'homme européen se fonde sur une écriture littéraire nourrie d'une vaste culture scientifique.