Jean Echenoz
″A part ça, je hais les points de suspension″
Bulletin : Lire 409 - octobre 2012
01 octobre 2012
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Numéros de page :
8 p. / p. 72-79
Il y a loin des sombres théâtres d'opérations de ″14″, le treizième roman de Jean Echenoz, dont le titre ne fuse pas pour rien comme une balle perdue, à la lumière et à la paix de l'appartement parisien où, sous le regard modérément indulgent de son bisaïeul Georges Echenoz ingénieur des Eaux à Nantes, peint par l'artiste vendéen François Eugène Brillaud (1847-1920), l'écrivain nous a fort civilement reçus. Qu'il avait clos le volet biographique de son oeuvre, après s'être mis dans la peau du musicien Ravel, du champion Zatopek et de l'inventeur Tesla, nous en étions avertis. Pour ce retour à la fiction, éblouissant de sobriété et de justesse, Jean Echenoz évoque - à sa façon : discours indirect, style impersonnel, précision ou commentaire toujours remarquable de soudaineté, d'incongruité et d'irréfutabilité - le sort d'une poignée de jeunes Vendéens et d'une jeune Vendéenne du premier jour de la mobilisation jusqu'à la ″consommation″ , du destin, inéquitable, des uns et des autres. Pourquoi s'est-il saisi d'un sujet aussi grave, boueux et sanglant que la Grande Guerre, a priori soustrait à l'humour et à l'ironie à quoi, pourtant, se reconnaît d'ordinaire sa prose ? Jean Echenoz s'en explique ci-après. Avec ce ton faussement détaché qui, depuis 1979, nous l'a rendu si furieusement attachant.