Des Carrières pastorales à Bischwiller, 1618-1663. Politique et discipline dans une communauté de réfugiés
Bulletin : Revue historique 688 - octobre 2018
01 octobre 2018
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pp.795-836
La question des carrières pastorales dans le monde réformé au XVIIe siècle est encore relativement mal connue dans le monde francophone. Au sein des Eglises qui appartiennent aux structures synodales du royaume de France, ces carrières sont surtout déterminées par les institutions consistoriales et synodales. Pourtant, il existe en marge de ce modèle français d’autres communautés francophones, mais fonctionnant selon un modèle contrôlé par un prince calviniste. C’est le cas dans le duché de Deux-Ponts, et l’étude du village de Bischwiller nous permet de l’observer. Au sein d’un milieu alsacien germanophone et luthérien, Jean II de Deux-Ponts octroie des privilèges à des réfugiés réformés francophones et leur garantit un pasteur. Le recrutement de ce dernier, largement contrarié par la guerre de Trente Ans, pose divers problèmes et permet d’observer les rapports de forces entre le pouvoir civil et les laïcs de l’Eglise locale, deux sphères qui sont loin d’être hermétiques, mais aussi des influences allemandes, suisses, alsaciennes, lorraines et françaises. Entre 1618 et 1663, plusieurs pasteurs se succèdent, dans des conditions politiques variables (notamment après que les Birkenfeld sont devenus seigneurs locaux) et surtout dans conditions disciplinaires parfois confuses. Cette Eglise, qui se nomme toujours « française » dans les sources, peut mobiliser différents modèles qui questionnent eux aussi la place du pasteur. Grâce à la documentation disponible sur ce cas de communauté en marge et à la croisée de diverses influences, l’historien peut analyser à l’échelle locale des problèmes que les sources laissent parfois dans l’implicite ailleurs.