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Alchimistes du guichet

01 octobre 2011
Numéros de page :
30 p. / p. 7-36
Derrière les façades centenaires des institutions de Wall Street, de Londres, de Paris ou de Hongkong, un nouvel ordre bancaire s'est mis en place imperceptiblement au milieu des années 1970. Les fondements du commerce de l'argent codifiés après le krach de 1929 pour les besoins du capitalisme industriel se sont effrités, puis ont explosé, sous la poussée d'une force brute nommée finance. En moins d'une décennie, les frontières nationales et les chaînes législatives qui reléguaient les établissements de crédit au troisième rang économique derrière les Etats et les grandes entreprises ont tour à tour été brisées. Le marché planétaire appelait un système bancaire global. Ce nouvel ordre dispose d'outils, d'agents, d'institutions et de régulations spécifiques. Dans les bureaux haut perchés, le jeune loup au costume clinquant a évincé l'homme gris et son sous-main de cuir; des instruments d'une sophistication inédite, des tactiques florentines, des profits himalayens ont supplanté le ronron du prêt à intérêt garantissant une marge de 3 %; l'informatique et les mathématiques ont aboli l'espace et le temps des transactions. En Europe, la politique monétaire, rouage central du gouvernement économique, fut soustraite au monde politique et placée sous le contrôle d'une Banque centrale «indépendante », c'est-à-dire proche des milieux d'affaires. Après quatre ans de tempête financière, un regard sur les ruines de l'économie mondiale inspire une question qui peut sembler triviale : au fait, à quoi devaient servir les banques ?