Longtemps soumis à des interprétations historiques marquées du sceau de différents nationalismes (français, italien et corse), le bilan chiffré de la Grande Guerre en Corse continue d'être sujet à polémiques. Le présent article s'intéresse à la construction et aux enjeux de ces discours multiples ainsi qu'à leurs conséquences sur la représentation que les insulaires se font d'eux-mêmes. Partie prenante de la construction de l'identité française de la Corse et repoussoir des prétentions italiennes de l'entre-deux-guerres, la surévaluation du nombre de victimes se retourne, dans les années 1980, contre ses promoteurs au point d'être instrumentalisée par le nationalisme corse. Dès lors, une querelle des chiffres va perdurer jusqu'à nos jours.