Très chers voisins
01 avril 2015
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Numéros de page :
29 p. / p. 172-200
Cet article analyse le transfert de logements opéré à Paris à partir de 1942, sous l'égide d'un service administratif de la préfecture de la Seine en charge de reloger les sinistrés dans les « logements juifs » vides. Il s'agit de documenter la question de l'antisémitisme à Paris à partir d'un observatoire latéral, la politique de logement, et de soulever des questions sur l'appropriation sociale de l'antisémitisme et ses motifs. Réseaux d'interrelations et d'informations, effets du voisinage, sociologie des « bénéficiaires » et des « prestataires », respectivement les sinistrés et les juifs absents d'après la terminologie administrative, toutes ces pistes conduisent à tenter de qualifier la disposition d'esprit des « fureteurs » d'appartements vides. Entre nécessité d'affronter les privations - notamment du logement - et réalité d'un antisémitisme fortement encouragé et encadré par les lois vichyssoises, notre enquête souhaite scruter le détail des postures et des jugements pour éclairer cet entre-deux. L'antisémitisme s'exprime comme une idée, mais il peut être commandé par les besoins impérieux de la vie quotidienne, cette double dimension est importante pour lui restituer toute son épaisseur sociale, notamment sur le terrain parisien.