Walter Benjamin
Bulletin : Europe 1008 - avril 2013
01 avril 2013
Numéros de page :
231 p. / p. 3-233
Dès qu'Hitler accéda au pouvoir; en mars 1933, Walter Benjamin quitta l'Allemagne pour un exil définitif. A Paris, à Ibiza, à Sanremo, à Svendborg où il fut à plusieurs reprises 1'hôte de Brecht, il mena une vie errante plutôt précaire, jusqu'à cette nuit de septembre 1940 où, muni d'un visa pour les Etats-Unis, il fût arrêté par la police à la frontière espagnole el se donna la mort en absorbant une dose de morphine qu'il gardait en réserve pour la dernière extrémité. Si parmi les philosophes du XXe siècle Benjamin est désormais reconnu comme l'une des voix les plus influentes et décisives, son livre «polyédrique et fragmentaire» excède les critères traditionnels de la philosophie. Elle privilégie la forme de l'essai, de l'aphorisme, concentre merveilleusement son génie dans les miniatures d' « Enfance berlinoise » ou déploie à l'infini les matériaux de construction du « Livre des passages » où le mouvement de la pensée se ramifie en méandres de lumière à travers le buissonnant paysage des citations. Dans cette oeuvre irriguée à la fois par la théorie critique matérialiste et par un messianisme issu de la tradition juive, on discerne un profond souci de penser le temps et l'histoire, de recueillir le futur oublié dans le passé, comme si la proustienne recherche du temps perdu devenait chez Benjamin une recherche du futur perdu pour en reporter l'énergie sur le présent lui-même et le révolutionner.