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David Lynch, l'homme d'un autre endroit

01 avril 2021
Numéros de page :
pp.84-109
Si l'objectif "lynchien" est entré un peu trop facilement dans le vocabulaire critique pour désigner une atmosphère indéfinissable, entre inquiétante étrangeté et onirisme diffus, comment aborder, loin des clichés, une oeuvre commencée il y a 50 ans sur grand écran et désormais poursuivie par les plateformes - un projet de série, "Wisterio", est annoncé sur Netflix pour la fin de l'année ? De fait, David Lynch n'a jamais cessé de filmer l'interzone entre un monde rêve et un réel abrasif pour s'aventurer sur la frontière séparant le fantasme et le vrai, la folie et la raison, le sublime et l'ordure ou encore la part obscure et le Tout apollinien. Cette synthèse irrésolue des opposés se lit aussi dans la contradiction entre une oeuvre à la violence parfois éruptive et un homme adepte de la méditation, prêchant l'harmonie universelle. Le "maître écart" aura captivé au moins deux générations de cinéphiles, à partir notamment d'"Elephant Man", dont on vient de fêter le 40e anniversaire. Plus proche de nous, l'ultime saison de "Twin Peaks" a divisé mais a permis la redécouverte d'une série qui aura bouleversé la grammaire des récits télévisuels. Passé maître dans l'art de la construction narrative, le cinéaste cisèle ses ouvertures, à la fois programmes et contre-lectures de l'histoire à venir. L'étude du bestiaire lynchien montre à quel point la question de l'animal est constante dans une oeuvre aux labyrinthes sémantiques qui ont désorienté nombre de spectateurs. La question du sens est-elle si incontournable ? L'ancien étudiants des Beaux-Arts, comme le rappelle l'entretien, aura en tout changé en profondeur la peinture de l'American Psyche. Sommaire. Que le spectacle commence : trois mystérieux prologues de David Lynch. Le bestiaire familier de David Lynch. L'affranchissement du regard, sur "Elephant Man" (1980). Choc-thérapie. David Lynch : "J'aimerais mordre ma peinture". Le monde lointain des anges, sur "Twin Peaks" (1990-1991, 2017). Sibylle en ce miroir : Lynch dans le labyrinthe du sens.