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A propos de Pierre Bourdieu et de la genèse de l'Etat moderne

01 mars 2014
Numéros de page :
8 p. / p. 98-105
Pierre Bourdieu s'interroge sur l'Etat en tant qu'objet social historique. En cela, il s'écarte de sa démarche antérieure, mais aussi de celle des historiens qui se limitent le plus souvent aux aspects matériels de l'Etat. Sa critique de l'approche des historiens est sévère, mais elle ne le conduit pas à remettre en cause sa confiance en leurs travaux. Pierre Bourdieu donne sa propre définition de l'Etat : il est ce qui fonde l'intégration logique et morale du monde social : si le consentement et la communauté ainsi créés sont illusoires, cela n'enlève rien à la puissance de cette illusion. La définition webérienne s'en trouve modifiée : il faut parler du monopole de la violence physique et de la violence symbolique, cette dernière l'emportant largement sur l'autre. De fait, la concentration et la maîtrise du pouvoir symbolique par l'Etat sont au coeur de la recherche de Pierre Bourdieu qui propose, pour analyser la façon dont le pouvoir symbolique génère consentement et légitimité, deux concepts : celui de la génétique structurale, pour comprendre la genèse des objets sociaux historiques tels que l'Etat, et celui de champ. Un aspect important du cours est la confrontation des vues de Pierre Bourdieu sur la genèse de l'Etat avec celles des "sociologues généralistes", dont il fait une critique sévère mais nuancée des théories historiques. Mais il est dommage qu'il ne se soit lui-même intéressé ni à l'Antiquité ni au Moyen Age, ce qui lui interdit de voir à quel point le pouvoir symbolique de l'Etat s'est développé sur le modèle et dans le sillage de celui de l'Eglise et de la monarchie pontificale, dont l'essor est précisément contemporain de la genèse de l'Etat moderne.