Anton Bruckner. Le triomphe d'un obstiné
Bulletin : Classica novembre 2024
01 novembre 2024
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Numéros de page :
pp.52-72
C'est un des parcours les plus fascinants et les plus déroutants de l'histoire de la musique. Celui d'un fils d'instituteur instruit par la campagne et l'église de sa Haute-Autriche natale, auteur de symphonies qui défient le temps, s'emparent de l'espace et mènent au ciel. Un parcours artistique que la biographie ne saurait expliquer. Comment comprendre en effet qu'un être à l'apparence rustique, aux manières gauches, objet de nombreuses moqueries, évidemment pas un sot mais pas non plus un intellectuel, puisse écrire une musique qui voie si loin, si large, si haut, si profond? Né en plein siècle du romantisme qui fait triompher la subjectivité, Bruckner (1824-1896) ne se confie jamais dans ses oeuvres et dépasse les contingences humaines. On se gardera bien de recourir à des formules usées et paresseusement colportées comme« ménestrel de Dieu» pour approcher un compositeur certes porté par une foi catholique inébranlable mais visionnaire : formé par les classiques viennois, les frères Haydn et Mozart, il tend la main à Mahler dans sa dernière symphonie. Le bicentenaire de la naissance d'Anton Bruckner, généreusement fêté en Autriche, donne l'occasion d'aller à sa rencontre pour espérer percer le mystère.