Dans la droite ligne de la définition d'Alberti du tableau comme fenêtre ouverte (De Pictura - 1935), on a trop souvent réduit "Fenêtre sur cour" à la seule pulsion scopique. Il est pourtant un autre aspect du film que l'on omet en général de mentionner : l'air, le vent, l'intangible - cet éther qui porte les sons, la chaleur, les odeurs, et qui influe sur cet autre invisible, le flot de pensée des personnages, intarissable.

Fragmentation, déstructuration, patchwork : la saison 3 de Twin Peaks a suscité de nombreux commentaires qui ont mis en avant son caractère hétéroclite, à la limite de la déchirure narrative. Comment faire sens d'un récit en apparence tellement composite, regroupant tant de personnages dispersés aux quatre coins des Etats-Unis ? Comment retrouver la réalité du "champ unifié", ce concept cher à David Lynch, masqué par un tel foisonnement kaléidoscopique ?

Depuis ses début derrière la caméra en 1989, Takeshi Kitano ressasse des thèmes qui lui sont chers. On connaît son intérêt pour la mer, pour les yakuzas ou pour le jeu. On connaît moins le rôle central joué par les fleurs dans son oeuvre. Les angiospermes occupent pourtant une place de choix dans son univers créatif. Le rapprochement que le cinéaste opère entre fleurs et violence s'inscrit dans la droite ligne des codes culturels japonais traditionnels qui font des fleurs l'archétype de la beauté et de la brièveté de l'existence.