Publié par Alfred de Vigny en 1826, cette oeuvre est considérée comme le premier grand roman historique français. C'est à la demande du directeur de l'Opéra-Comique, Léon Carvalho, séduit par l'idée d'une transposition opératique du roman, que Gounod accepte de revenir sur le devant de la scène lyrique en 1877, après dix ans d'absence. Il livre un ouvrage qui ne renie rien des séductions musicales de Roméo et Juliette ou Faust, mais regarde très nettement du côté du grand opéra historique. La seconde version de l'ouvrage, remaniée pour l'Opéra de Lyon, transforme d'ailleurs les dialogues parlés en récitatifs pour améliorer la fluidité du discours et la noblesse de l'action. C'est cette ultime version de l'ouvrage qui est ici présentée en recréation mondiale. (Electre)

Selon Berlioz, Spontini fut - après Gluck - le plus grand génie de la musique française à préparer le siècle romantique. Et peut-être la mal connue Olympie, que Spontini fit créer en 1819 - et qui fut reprise en 1826 sous le titre modifié Olimpie - marque-t-elle plus qu'on ne l'imagine encore le véritable bouleversement lyrique qui engagera l'opéra français sur les voies de la modernité du "grand opéra". De bout en bout, cette partition, ciselée par une instrumentation étonnante, est nourrie d'effets spectaculaires qui préfigurent à l'évidence Les Troyens de Berlioz. L'omniprésence d'un choeur pléthorique, la vaillance des interventions d'Antigone, le pathétique du rôle de Statira (imaginé pour Caroline Branchu, alors à son zénith), tout concourt à marquer les esprits au point d'avoir ému Berlioz aux larmes. L'un des premiers péplums du XIXe siècle, assurément. (Electre)

Hypermestre de Charles-Hubert Gervais est le dernier opéra français du XVIIIe siècle, ici dirigé par György Vashegyi. Aucun opéra français de l'époque n'aurait été complet sans l'intervention généreuse du choeur et de la musique instrumentale. Gervais saupoudre l'oeuvre d'une éblouissante série de divertissements et de numéros festifs pleins de danses... le tout interprété avec une grande connaissance stylistique et une vivacité hors-pair par l'Orfeo Orchestra et Purcell Choir de Vashegyi. (Electre)

Le Requiem de Mozart n'est présenté à Paris qu'en 1804, dans une version légèrement différente de celle composée par Mozart. La presse se fait l'écho d'un triomphe. 1804 est aussi l'année du sacre de Napoléon : de ses conquêtes méditerranéennes, Bonaparte avait rapporté un goût prononcé pour la musique italienne. Il confie ainsi au Napolitain Giovanni Paisiello (1740-1816) la direction de sa chapelle musicale et lui commande la musique de son couronnement, une Messe solennelle en si bémol majeur. Le Palazzetto Bru Zane a créé l'édition moderne de l'oeuvre qui est enregistrée ici. Outre la fastueuse 1804, l'autre année qui relie Napoléon à Mozart, c'est 1841, lorsque son Requiem retentit à nouveau aux Invalides alors que le corps de Napoléon y fait son entrée...Sandrine Piau, Chantal Santon, Eléonore Pancrazi, Mathias Vidal et Thomas Dolié sont les solistes de ce programme dirigé par Julien Chauvin, à la tête de son Concert de la Loge et du Choeur de Chambre de Namur.

Sémiramis torturée par les maléfices de Zoroastre, violence, inceste, meurtre et magnificence : voici l'une des plus étonnantes tragédies lyriques ! Son compositeur Destouches eut un destin hors du commun : Missionnaire au Siam, puis Mousquetaire dans l'Armée Royale, il se découvre musicien et se forme auprès de Campra. Sa première ouvre lyrique, Issé, triomphe en 1697 devant Louis XIV. Vingt ans plus tard, sa dernière tragédie-lyrique, Sémiramis (1718), est d'une grande force dramatique, celle du destin funeste de la Reine de Babylone qui, craignant l'oracle d'un fils qui la mènerait à la mort, l'a abandonné dès sa naissance. Mais Arsane, le fils adoptif qu'elle adore sans savoir sa naissance, accomplira la volonté des dieux pour sauver sa bien-aimée Amestris, rendu fou par la magie de Zoroastre. De ce livret puissant, Destouches tire des effets saisissants qui font de son ouvre ultime un véritable torrent passionnel. Margaux Blanchard et Sylvain Sartre portent à l'incandescence cet opéra de l'amour impossible.

Maître de l'opéra français du XVIIIe siècle, Rameau écrivit pour la scène durant trois décennies (1733-1764). Sa trentaine d'ouvrages lyriques donnent une place considérable à la voix de haute-contre, incarnation de la plupart des rôles titres : Platée, Dardanus, Hippolyte, Pygmalion... Mathias Vidal, brillant représentant de cette tessiture de haute-contre, en est l'un des meilleurs spécialistes. Ayant chanté en scène la majorité des opéras de Rameau, il incarne avec évidence leurs personnages. Il a conçu avec Gaétan Jarry un programme des airs les plus brillants et les plus expressifs en ajoutant les scènes accompagnées d'un chour. Ce florilège fait resplendir la voix éclatante de ce pilier de l'Opéra Royal de Versailles. Pour ce chanteur passionné du répertoire français, y enregistrer un récital dédié à Pierre de Jelyotte, Haute-Contre de Rameau, c'est faire sonner la théâtralité de sa musique jusqu'à un paroxysme triomphal !

Et si le tour de force de l'opéra français du Siècle des Lumières était Scylla et Glaucus ? Le célèbre violoniste Leclair décide à 50 ans d'écrire son premier ouvrage lyrique et y met une énergie irrépressible. Le drame en est implacable : la nymphe Scylla repoussant les avances du Demi-Dieu Glaucus, celui-ci se tourne vers la magicienne Circé pour qu'elle l'ensorcèle ; amoureuse de Glaucus, Circé mène Scylla à la folie et la transforme en rocher meurtrier... Scène infernale, tempête marine et cataclysme final sont convoqués pour donner un relief saisissant à ce trio d'amours inassouvis, aux épanchements d'une beauté irrésistible. Le chef et violoniste Stefan Plewniak emmène un splendide plateau de solistes dans les tourbillons de la vengeance !

En 1743, deux ans avant la Platée de Rameau, Boismortier créé un "ballet comique" extraordinairement moderne et loufoque : Don Quichotte chez la Duchesse. Au fil d'une intrigue délirante, le héros de Cervantès croise monstres, enchanteurs, princesses et Japonais : autant de prétextes aux danses et aux choeurs décalés et audacieux. La beauté musicale voisine avec un comique parodique et irrévérencieux. Une oeuvre de choix pour Hervé Niquet, qui anime son Concert Spirituel d'une énergie sans pareille !

Camille Saint-Saëns, artiste globe-trotter, compose en 1872 La Princesse jaune ; l'oeuvre illustre l'engouement japonisant du moment. Kornélis, campé par le ténor Mathias Vidal, ne rêve que pays du Soleil-Levant. Sous emprise d'un philtre hallucinogène, il s'éprend de Ming, princesse fantasmée. Sa cousine Léna - la soprano Judith van Wanroij - se désespère de cette passion et n'ose avouer ses propres sentiments à Kornélis, qui reviendra à la raison. La durée de cet opéra permet à cet enregistrement d'offrir, en complément lyrique, une version inédite des six Mélodies persanes de Saint-Saëns, donnant l'occasion de tirer différemment le fil d'un exotisme tourné vers d'autres horizons. Ces oeuvres sont portées par l'Orchestre national du Capitole de Toulouse, sous la baguette de Leo Hussain.

Jean-Philippe Rameau (1683-1764) a laissé deux versions très différentes de sa tragédie en musique Zoroastre : la première, en 1749, essuie des cabales et l'oeuvre est retirée de l'affiche. Rameau la remanie complètement en 1756. ? cette époque, Rameau est au sommet de son art. Mélodie, harmonie, orchestration, écriture chorale n'ont plus de secrets pour lui. Avec Zoroastre, il innove encore. Pour la première fois, il supprime le prologue, et fait de l'ouverture un "programme" philosophique, le combat du jour et de la nuit, du bien et du mal. La version de 1749 est toute entière soumise aux idées avant-gardistes : Zoroastre est comme Tamino dans La Flûte enchantée, mais deux générations plus tôt. Ce qui déroute une partie du public : Zoroastre est un opéra moral, social et philosophique. La version de 1749 attendait encore sa recréation. Alexis Kossenko relève le défi avec passion, accompagné par un plateau exceptionnel dont Véronique Gens, Jodie Devos, Reinoud Van Mechelen, Mathias Vidal, Tassis Christoyannis...

Hervé Niquet ressuscite cette tragédie en musique de 1696 avec pour la première fois, l'effectif et la disposition exacts de l'orchestre de l'Opéra de 1700. Une version historiquement informée de cet 'Ariane et Bacchus' de Marin Marais, violiste à l'Académie royale de musique à partir de 1676, au moment où triomphe l'Atys de son mentor, Lully. Celui-ci initie Marais à la composition d'opéras et 'Ariane et Bacchus' est créé neuf an après la mort de Lully... Rendue possible grâce au concours du Centre de musique baroque de Versailles et donnée en concert au Théâtre des Champs-Elysées avec un grand succès en 2022, cette Ariane est ' justement tirée de l'oubli, écrit Diapason : elle est magnifiée par une interprétation sobre et juste d'Hervé Niquet et du Concert Spirituel, en osmose avec une distribution remarquable ', dont notamment Judith van Wanroij, Véronique Gens, Mathias Vidal, Hélène Carpentier, Marie Perbost, Matthieu Lécroart, David Witczak, Tomislav Lavoie, Philippe Estèphe...

Voici l'histoire de Phaéton, valeureux conducteur du char du Soleil, mené ici par Vincent Dumestre et Benjamin Lazar, riches de deux décennies de complicité lullyste. Comme à l'époque, ils font vibrer l'Opéra de Versailles de cette tragédie lyrique flamboyante créée à Perm en Russie en 2018. (Electre)

? l'occasion des 450 ans de la naissance de Monteverdi, Cappella Mediterranea et Leonardo Garcia Alarcon lui rendent hommage avec ce programme empruntant au thème universel des péchés et vertus qui traverse son univers lyrique, ses madrigaux et la Selva morale : le compositeur donne, avec L'Incoronazione di Poppea - l'opéra peut- être le plus amoral de l'histoire de la musique - une représentation du vice et des émotions qui y sont liées mais offre également son pendant vertueux, son remède moral, avec les madrigaux de la Selva morale. C'est dans cette perspective que ce projet a été imaginé. (Electre)

Bien que Lully n'occupât jamais de charge à la Chapelle du roi, son influence sur le développement du grand motet, si emblématique du Grand Siècle, fut décisive. Il composa pour les grandes cérémonies de la cour des motets d'apparat célébrant la gloire de Dieu et celle du roi. Des nombreuses funérailles royales, celles de la reine Marie-Thérèse en 1683 comptent parmi les plus grandioses. Le Dies irIJ et le De profundis de Lully y furent donnés. Mais son motet le plus célèbre est sans conteste son Te Deum, qui retentit pour la première fois en 1677 et qui devint le favori du roi. En 1687, Lully le dirige encore une fois mais il se frappe violemment le pied de la lourde canne qui lui sert à battre la mesure. La blessure s'infecte, emportant le surintendant le 22 mars. Tragique destin pour celui qui sut traduire la gloire la plus éclatante mais aussi toute l'angoisse de la mort dans une même grandeur... Une grandeur théâtrale qui caractérise cette version enregistrée à la Chapelle Royale du Château de Versailles. Lully est à l'honneur en 2019, à l'occasion du 350ème anniversaire de l'Académie Royale de Musique dont il fut le directeur de 1672 à sa mort. (Electre)