Carmen est sans conteste le plus espagnol des ouvrages lyriques du répertoire français. On y trouve bien sûr tous les lieux communs ibériques - les remparts et les arènes de Séville, la gitane, le toréador, la corrida... - mais aussi et surtout une musique radicalement nouvelle et une histoire d'amour qui a marqué les esprits aux quatre coins du monde, faisant de Carmen un mythe universel, au même titre que Faust ou Don Juan.

A Paris, au XIXe siècle. Une bande d’étudiants sans le sou compte sur les joies de la vie pour égayer un peu son quotidien misérable, car manger, se chauffer ou payer son loyer tient du luxe ! La tendresse de la petite cousette Mimi apporte lumière et chaleur au poète Rodolfo : tous deux vivent passionnément leur coup de foudre et font connaître leur amour à leurs amis durant la soirée de Noël. Le peintre Marcello, lui, est habitué aux coups d’éclat avec Musette, sa maîtresse volage : leur couple forme un contrepoint plein d’humeur à celui, plus mélodramatique, de Mimi et Rodolfo, qui finissent par rompre, bien malheureux de ne réussir à s’entendre. En fait, Mimi se sait condamnée par la phtisie qui la ronge peu à peu. Bien que séparée de Rodolfo, elle viendra expirer dans ses bras, sous les yeux des bohèmes, incapables de la soigner dans leur triste mansarde du Quartier Latin.

Cet opéra a été composé d'après le roman de l'abbé Prévost, La véritable Histoire du Chevalier Grieux et de Manon Lescaut, inséré dans son oeuvre plus vaste, Mémoires et aventures d'un homme de qualité, publié en 1731. Debussy, qui éprouvait pour Massenet des sentiments contradictoires, écrivit à la mort du compositeur, en 1912 : "A-t-on entendu dire des jeunes modistes qu'elles fredonnaient la Passion selon Saint Matthieu ? Je ne crois pas. Tandis que tout le monde sait qu'elles s'éveillent le matin en chantant Manon ou Werther".

Rinaldo, opéra "magique" avec lequel Haendel, fraîchement débarqué de sa Saxe natale, partit à la conquête du public londonien, reprend la légende de la Première Croisade, inspirée de "La Jérusalem délivrée" du Tasse et du "Roland furieux" de l'Arioste. Tout devrait contribuer à faire de Rinaldo un spectacle total : une machinerie et des effets de scène spectaculaires, une intrigue à la fois guerrière, fantastique et amoureuse, et des parties vocales d'une remarquable diversité.

Dresdre, 1817. Carl Maria von Weber et le poète Johann Friedrich Kind décident d'écrire à quatre mains une oeuvre destinée à l'opéra. Leur choix se porte sur une nouvelle fantastique de Johann August Appel, "Der Freischütz" (le Franc-tireur), parue en 1810. Kind conserva tous les ingrédients du conte fantastique et du romantisme - la forêt, la nuit, la lune, les lieux enchantés, les tempêtes, les rêves, les prémonitions, les visions, la magie noire, le désespoir, l'amour, le destin - mais imagina une fin heureuse à l'histoire.

Incontestablement, Proserpine est une oeuvre à part dans la longue série des tragédies en musique de Lully. Créée sept ans avant la mort du compositeur, elle inaugure la "deuxième manière" de Lully qui aboutira aux chefs-d'oeuvres de construction musicale et dramatique que sont Amadis, Roland et Armide. Créé en 1680, l'ouvrage eut une destinée moins emblématique qu'Atys ou Armide, mais fut rejoué très régulièrement à Paris et à Versailles jusqu'en 1758. Proserpine semble ouvrir une ère nouvelle : celle de la musique "pure".

Composé par le Viennois Alban Berg entre 1914 et 1922 et créé à Berlin sous la direction d'Erich Kleiber en décembre 1925, Wozzeck occupe une place unique dans l'histoire de l'opéra puisqu'il est le premier ouvrage lyrique atonal - et pratiquement le seul qui se soit pleinement imposé dans le répertoire. Berg s'est servi du drame de Georg Büchner intitulé "Woyzeck". Il en a lui-même écrit le livret, en s'appuyant fidèlement sur l'original, ne retranchant que quelques rares scènes.

Basé sur l'oeuvre homonyme de Maurice Maeterlinck, Pelléas et Mélisande est le seul opéra achevé de Debussy. C'est au mois de mai 1893 que Debussy découvre la pièce éponyme de Maeterlinck et le 8 août suivant, il obtient l'autorisation d'écrire un opéra à partir du texte original. C'est lui-même qui rédigera le livret de l'ouvrage. Son travail dura huit ans. Le 3 mais 1901, il présenta son oeuvre au piano à Albert Carré, le directeur de l'Opéra-Comique. Les répétitions commencèrent le 13 janvier 1902 et la création, dirigée par André Messager, eu lieu le 30 avril.

Donizetti conçoit Lucia Di Lammermoor dès le mois de mai 1835, d'après un roman de Walter Scott, La fiancée de Lammermoor, lui-même inspiré d'une histoire authentique s'étant déroulée à la fin du XVIIe siècle, en Écosse. Son librettiste, Salvatore Cammarano, en a tiré une adaptation remarquable, à la fois simple, logique et dramatique. Toute l'action de cet opéra repose sur son héroïne, qui est de loin le personnage possédant le plus fort développement dramatique, et qui fait preuve d'une palette de sentiments et d'états d'âme extrêmement variée.

C'est avec La Giaconda - qui n'a rien à voir avec la Joconde du Louvre - que Amilcare Ponchielli rencontra le succès qu'il espérait, à l'âge de 42 ans. Epoux de la soprano Teresa Brambilla, qui allait d'ailleurs devenir une excellente interprète de La Gioconda, Ponchielli assista à la première de son opéra à la Scala de Milan, où il fut ovationné plus de trente fois au cours de la représentation. Ce fut là son unique succès. Ponchielli et son librettiste, Arrigo Boito, se sont inspirés d'un drame de Victor Hugo, "Agenlo, tyran de Padoue". Le résultat est romantique et mélodramatique à souhait !

Depuis sa création en 1901, Rusalka est devenu l'opéra le plus célèbre de Dvorák. Avec "La fiancée vendue" de Smetana, c'est même l'oeuvre fétiche du répertoire lyrique tchèque. Il faut dire que l'inspiration du compositeur tchèque est à son comble : l'auteur de la "Symphonie du Nouveau Monde" déploie une palette orchestrale somptueuse, et décrit avec poésie les paysages et les atmosphères nocturnes de l'opéra. Ce conte, bouleversant, relate l'histoire de l'ondine Rusalka, devenue femme après être tombée amoureuse d'un prince. Amour, magie et désillusion inspirent à Dvorák des mélodies merveilleuses, enflammées ici par le chef Jaroslav Krombholc et la soprano Ludmila Cervinková dans cette version historique.