Loin d'être un simple objet, la frontière construit la relation qu'une société entretient avec l'altérité. Elle ne serait donc pas seulement une ligne ou un ensemble d'institutions, mais bien semblable au coeur qui bat au rythme de celui qui respire et vit. Qu'elle soit un mur, une porte, une barrière de barbelés, elle traduit notre volonté d'exclure, d'aimer, de détester, de marginaliser nos émotions, nos peurs, notre vision du monde. La frontière aurait-elle une âme ? Existe-t-il une éthique de la frontière ?

Le but du présent article est d'aborder les notions de limites, de fronts et de frontières en Asie centrale dans une perspective sociologique et anthropologique, en s'affranchissant de l'histoire de la construction des frontières étatiques, sujet complexe, multidimensionnel et largement étudié par les historiens, géographes et politologues depuis le XIXe siècle et renouvelé depuis la fin de l'URSS (Thorez 2011, Gorshenina 2012 et 2014).