Quand Auguste réorganisa le monde romain sous la forme de l'empire, l'érotisme joyeux, anthropomorphe et précis des Grecs se transforma en mélancolie effrayée. Des visages de femmes remplis de peur, le regard latéral, fixent un angle mort. Le mot phallus n'existe pas. Les Romains appelaient fascinus ce que les Grecs appelaient phallos. Dans le monde humain, comme dans le règne animal, fasciner contraint celui qui voit à ne plus détacher son regard. Il est immobilisé sur place, sans volonté, dans l'effroi. Pourquoi, durant tant d'années, ai-je écrit ce livre? Pour affronter ce mystère : c'est le plaisir qui est puritain. La jouissance arrache la vision de ce que le désir n'avait fait que commencer de dévoiler.

Michela Marzano, trente-cinq ans, est normalienne, philosophe et chercheuse au CNRS. Elle est notamment l'auteur de Penser le corps (PUF, 2002), La Pornographie ou l'épuisement du désir (Buchet Chastel, 2003), La Fidélité ou l'amour à vif (Buchet Chastel, 2005).

L'analyse de 78 oeuvres, choisies pour leur représentativité et leur esthétisme, des temps mérovingiens à l'aube de la Renaissance illustre l'imaginaire ou la réalité concrète de l'amour qui se révèle, selon les commanditaires ou les artistes, refoulé ou débridé. Ces images sont organisées en six chapitres, partant des dogmes de l'anthropologie chrétienne à la sexualité au quotidien.

A l'aide d'exemples, l'auteur démontre sur le ton de l'humour, les paradoxes des sociétés postmodernes où l'apparente démocratisation des pratiques sexuelles semble aller de pair avec une criminalisation croissante de ses représentations. Un manifeste pour la liberté d'expression et contre la panique morale.