″Ainsi doit-il être puni..." Le roi, le chevalier et le châtiment dans le Royaume latin de Jérusalem
Bulletin : Revue historique 676 - octobre 2015
01 octobre 2015
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Numéros de page :
22 p. / p. 771-792
Au Moyen Age, la justice est l'un des fondements du pouvoir : gouverner, c'est toujours, au moins en partie, punir les criminels, et, ce faisant, maintenir le monde en ordre. En sorte que travailler sur la façon dont, dans une société donnée, les châtiments et les méfaits s'articulent les uns aux autres, c'est pénétrer au coeur de la façon dont cette société pense, organise et vit le pouvoir. C'est ce que propose cet article à travers une relecture du "Livre au Roi", recueil de lois féodales du Royaume latin de Jérusalem, compilé au tout début du XIIIe siècle pour servir les ambitions du roi Amaury II de Jérusalem. Comportant de nombreux chapitres qui déroulent les différents crimes et les châtiments par lesquels il convient de les punir, le "Livre au Roi" offre l'image d'une société féodale en pleine recomposition, traversée des dynamiques contradictoires que sont la réaffirmation d'une monarchie forte et l'émergence de puissants lignages seigneuriaux. Les châtiments contribuent dès lors autant à construire un ordre social idéal, dans lequel les chevaliers sont systématiquement placés au-dessus des bourgeois, qu'à redessiner un édifice politique dominé par la figure royale.