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W. G. Sebald

01 mai 2013
Numéros de page :
229 p. / p. 3-231
La grandeur littéraire est-elle encore possible et à quoi pourrait ressembler aujourd'hui la dignité de la littérature ? En posant naguère cette question, Susan Sontag considérait que l'oeuvre de W.G. Sebald la justifiait avec une rare évidence. Que l'aura de cet écrivain n'ait depuis lors cessé de grandir, cela s'explique par des raisons assez fortes pour n'être pas tributaires du goût du jour. Né en Allemagne en 1944, Sebald s'était installé en Angleterre en 1970, à distance de son pays natal mais non des ressources de sa langue et des traumatismes de son histoire. Il trouva la mort en 2001 dans un accident de voiture, près de Norwich, peu après avoir publié « Austerlitz », son ultime chef-d'oeuvre. Cet exilé volontaire fut sensible aux destins d'autres exilés. Il arpenta l'espace géographique de l'Europe et les replis de son histoire, se faisant voyageur, conteur et archiviste. Tout en mêlant l'investigation aux réminiscences, cet archéologue de la mémoire ne cessa de cheminer sur des lisières où la scrupuleuse vérité des faits admettait sans trahison de s'enchevêtrer à la fiction. A la fois sinueuse et kaléidoscopique, élégante et grave, l'écriture élégiaque de Sebald est empreinte d'une mélancolie qui n'altère en rien son acuité, sa précision, ni même sa subtile ironie. Elle tend l'oreille à des murmures restés inaudibles et relève des traces que l'oubli recouvre déjà. Son plus constant souci est d'illuminer la « matière noire » de l'histoire catastrophique de l'Europe. Le « lyrisme documentaire » de Sebald voudrait rompre les parois entre les temps, entre les vivants et les morts, avec l'espoir que la « mystérieuse survie du mot écrit » puisse déjouer la désolation et répondre à l'irréparable de la perte. « Des Emigrants » aux « Anneaux de Saturne » et de « Séjours à la campagne » à « Austerlitz », Sebald s'impose parmi les écrivains comme un de nos contemporains essentiels. Ce numé