La phrase de Marcel Proust, défi à la grammaire et au temps, avec son arrêt qui se fait attendre au privilège des compléments et des digressions, cette phrase en ornement capable de creuser comme d'habiller le monde tout entier résonne à nulle autre pareille. Elle volette, masse légère, échappant aux uns tandis que d'autres se l'accaparent et l'érigent en modèle. Rares, ceux qui parcourent d'un bout à l'autre "À la recherche du temps perdu". Mais encore plus rares, ceux qui n'ont pas tenté, une fois au moins, de s'attaquer à cette cathédrale littéraire. Chloé Cruchaudet a choisi de la traverser comme dans un songe à travers l'histoire d'un être de lumière resté dans l'ombre de l'écrivain durant les dernières années de sa vie, sa servante Céleste Albaret. Céleste a voleté huit ans autour de Marcel Proust - ou plutôt. à bien des égards, Céleste a porté Marcel Proust, avec poigne et délicatesse, naïveté et subtilité. Si elle apparaît dans ses lignes, Céleste a surtout été un personnage de la vie de Proust. Ils partageaient cette force fragile des « belles personnes ». Dans un diptyque subtil, Chloé Cruchaudet poétise la puissance de leurs liens et révèle la part infiniment « céleste » de Marcel Proust.