Censeurs et 'mos maiorum' dans la construction de l’'ethos' républicain
Bulletin : Revue historique avril 2023
01 avril 2023
Auteurs
Numéros de page :
pp.259-279
Dans le "De Legibus", Cicéron présente sa vision des censeurs républicains et l’ensemble de leurs devoirs. Il précise notamment qu’ils devraient régler les mœurs du peuple et ne pas laisser de scandale dans le Sénat, évoquant ici le contrôle de normes comportementales au sein de la 'ciuitas'. La représentation traditionnelle que l’on se fait des censeurs les présente comme l’incarnation et les protecteurs de l’'ethos' du Romain idéal au sein de la'ciuitas', reposant sur une stricte observation du 'mos maiorum'. Cette image s’appuie principalement sur les sources datant de l’époque impériale puisque peu de sources de l’époque républicaine, évoquant les censeurs et leurs activités, nous sont parvenues. L’objectif de cet article est d’expliquer la nature du lien unissant les censeurs à la construction d’un 'ethos' républicain, à travers notamment le respect du 'mos maiorum'. Nous étudierons tout d’abord les moments forts de cette construction. La censure de 184 apparaît comme une étape cruciale dans ce processus faisant du censeur le gardien et l’incarnation de l’'ethos républicain'. Toutefois, la censure de Caton est, paradoxalement, en rupture avec le 'mos maiorum', abandonnant certaines normes de comportements et de représentations sociales traditionnelles de son époque. Ce processus se retrouve également dans la politique augustéenne de (re)moralisation de la société romaine, mettant en avant un nouvel idéal d’'ethos' sénatorial. Nous évoquerons ensuite deux problèmes que soulèvent ces deux moments : la question de la réelle capacité d’action des censeurs dans ce processus de construction de cette image et la réception de leurs actions ; la particularité des sources, pour la plupart impériales, dans cette construction sociale et politique assez tardive, arrivant à masquer le fait que la construction de cet 'ethos' s’opère parfois en rupture avec le 'mos maiorum', pourtant censé en être le cœur.