En un sens, ce dossier prolonge celui consacré aux populismes, il y a trois mois. Quand cesse l'Etat de droit, s'impose le règne de l'irrationnel, de la foule vengeresse qui se substitue à la loi. En privilégiant une seule étude de film, celle d'"Autopsie d'un meurtre", nous ne voulons pas seulement rendre hommage à un chef-d'oeuvre, mais pointer l'importance d'un cinéaste, Otto Preminger, Juif viennois, témoin d'un empire englouti par la Première Guerre mondiale, l'Autriche-Hongrie, qui se jeta ensuite dans les bras du nazisme.

Selon la formule consacrée, chaque film est une fenêtre sur le monde. Comme le guide touristique d'un bouleversant voyage au coeur de l'âme humaine (parfois). Mais bien sûr, certains voyages sont plus enrichissants que d'autres, et les guides qui nous invitent à l'aventure ne sont pas également aguichants. A l'aune de la métaphore, c'est évident que le voyage que promet "Autopsie d'un meurtre" est l'un des plus beaux qui soient. Non pas qu'il nous permette de parcourir le monde, puisque l'essentiel du film se déroule au contraire entre les murs d'un tribunal.