Avant de devenir un ténor de la nouvelle vague, François Truffaut fut un critique de cinéma féroce. Pour "l'Obs", plusieurs réalisateurs ont lu ses chroniques aujourd'hui rééditées.

François Truffaut fait partie de ces cinéastes méconnus à force de célébrité, parce que beaucoup de critiques et de cinéphiles croient si bien connaitre leurs films qu'ils ne pensent pas nécessaire de les revoir pour en parler, admirateurs comme détracteurs jugeant leurs évaluations définitives, chacun campant sur ses positions, a priori, idées reçues.

La vague n'est plus nouvelle. Voilà longtemps qu'elle s'est disséminée sur les rochers : les aventures individuelles, puis la mort. Il importe peut-être plus, aujourd'hui, d'examiner l'originalité des cinéastes qu'elle a portés que d'envisager son apport collectif. Les deux metteurs en scène qui font l'objet de ces pages ont certes employé les mêmes acteurs et encouru le même reproche, plutôt futile : celui d'avoir trahi l'inspiration initiale du mouvement. Ils n'ont pas entrepris de remettre ostensiblement en cause à chaque instant tous les usages du cinéma narratif.

A l'épaisse mais anti-monumentale "Correspondance de Truffaut" parue quatre ans après sa mort en 1988 s'ajoutent désormais ces lettres pour la plupart inédites, regroupées et annotées avec une remarquable minutie par Bernard Bastide. L'angle en paraît particulier (les écrivains n'étant pas les collaborateurs directs du cinéaste), mais la littérature baigne tellement la vie et l'oeuvre de cet "homme-livre" (l'expression désignant les résistants de "Fahrenheit 451", qui apprennent par coeur tout un ouvrage face aux autodafés ambiants), que ces échanges se révèlent structurants.