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Diderot

01 octobre 2013
Numéros de page :
191 p. / p. 3-193
A l'exception de son travail sur l' « Encyclopédie », les contemporains de Diderot ne purent avoir de ses écrits qu'une vision très incomplète. Ses proches se désolaient qu'il n'eût pas laissé une oeuvre personnelle, capable de l'égaler à Voltaire ou à Rousseau. La reconnaissance de son génie a emprunté des chemins de traverse. Ce sont les Allemands - Goethe, Schiller, Hegel - qui ont les premiers pressenti une oeuvre essentielle. Des inédits ont été révélés au fil du temps. On connaissait l'Encyclopédiste, on découvre le romancier, l'auteur de contes et de choses vues ; c'est ensuite l'épistolier éblouissant des lettres à Sophie Volland qui s'impose ; puis l'inventeur d'un genre littéraire, le Salon de peinture comme mise en récit des tableaux accrochés dans une exposition. Diderot ouvre la voie à Stendhal et Gautier, Baudelaire et Apollinaire. Le philosophe matérialiste et le penseur politique ont été revendiqués par la mouvance marxiste. Les développements de la biologie et de l'informatique, dans un monde multipolaire, ont enfin mis en valeur un poète et un théoricien de la complexité. Les philosophes se sont aperçus qu'ils étaient passés à côté d'un auteur qui ne se laisse pas ranger dans une case ni étiqueter. Reste le théâtre contre lequel sévit un préjugé tenace et qui mérite d'être lu et monté. Restent surtout des dimensions insoupçonnées qui attendent leurs inventeurs. « J'aime Diderot, dit Stéphane Audeguy dans ce numéro d'« Europe », parce qu'il joue de la langue classique comme le Neveu du clavecin. Il en joue jusqu'à se mettre en nage. Et il fait danser à la langue, avant l'heure, une sorte de carmagnole assez joyeuse. » Diderot est par excellence un écrivain et un penseur en mouvement, un manieur d'idées et un manipulateur de formes. Il reste un brouilleur d'évidences pour nous forcer à nous interroger sur nos certitudes, en même temps qu'un enchanteur qui nous invite à jouir de la