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Pour en finir avec le despotisme. L'image de Méhémet-Ali dans l’opinion publique franco-britannique

01 avril 2020
Numéros de page :
pp.105-133
Méhémet-Ali occupe une place à part entière dans la galerie de portraits des souverains orientaux. Associé au stéréotype orientaliste du despote oriental au début de son gouvernement sur l’Egypte, il fut progressivement représenté comme le modèle de l’homme d’Etat réformiste influencé par la civilisation européenne. Il fit donc l’objet d’une véritable admiration en France et même dans une partie de la société anglaise. Cette nouvelle image ne se construisit pas ex nihilo mais grâce à une politique d’influence que le vice-roi mena en France et en Angleterre par le biais de son conseiller et médecin Clot-Bey ainsi que par des voyages qu’accomplirent plusieurs jeunes membres de l’élite égyptienne. Son objectif était de pouvoir devenir une alternative crédible au sultan ottoman au cas où celui-ci aurait été renversé par les Russes. Cette stratégie paya au cours de la crise de 1839-1840 qui vit le pacha d’Egypte défier une seconde fois Mahmoud II qui cherchait à récupérer la Syrie. L’opinion publique française défendit dans son immense majorité Méhémet-Ali tandis que la presse anglaise versa dans la francophobie, tout en épargnant le pacha soutenu par la France. Considéré en France comme l’instrument de la revanche contre la coalition qui conduisit au congrès de Vienne, Méhémet-Ali devait rester du point de vue anglais un allié pour pérenniser de la route des Indes. Produit d’une lutte d’influence en Orient, de la mise en place de réseaux pro-égyptiens et de la réception par un public pétri d’orientalisme, la fascination pour Méhémet-Ali nous permet de comprendre les dessous de la rivalité franco-britannique dans cette région du monde, rivalité qui ne trouva une solution qu’avec le percement du canal de Suez.