Pays d'immigration massive depuis le XIXe siècle, la France a toujours pratiqué une politique d'intégration fondée sur la citoyenneté individuelle, sans pour autant interdire les particularismes dans la sphère privée. Elle a ainsi bénéficié d'un apport de main-d'oeuvre conséquent permettant de compenser la faible fécondité puis, durant les Trente Glorieuses, de contribuer au développement industriel français.

Si l'actualité politique a donné un rôle central au problème de la burka, il ne faut pas prendre le risque de réduire le ″problème des immigrés″ à la burka ou même aux immigrés, mais une fois encore, rappeler que ce qu'on nomme le problème des immigrés est d'abord celui de la société d'installation de ces derniers.

L'enlisement du débat français sur la pluralité culturelle ne se traduit pas seulement par la difficulté d'y différencier de façon autre que circonstancielle droite et gauche. Il se caractérise aussi, et ce n'est pas sans rapport, avec l'absence de toute référence, de part et d'autre, à plusieurs options possibles, notamment celles du multiculturalisme et, on expliquera plus loin de quoi il s'agit, de l'interculturalisme. Pour ce qui est, en tout cas, du refoulement du multiculturalisme, il ne date certes pas d'hier, mais il est patent.

Après des décennies de dénonciation de la "passion égalitaire" qui caractériserait la dynamique démocratique, il est devenu difficile de défendre l'égalité comme horizon politique. Cette difficulté est plus grande encore lorsqu'il est question des étrangers clandestins qui subissent la précarité sociale, mais incarnent aussi des différences culturelles de plus en plus souvent interprétées comme des obstacles à l'intégration.

Au moment où s'ouvre la Cité nationale de l'histoire de l'immigration, la sociologue Dominique Schnapper explique que la question de l'intégration ne se pose pas qu'aux descendants de migrants, mais concerne la société tout entière.