Les groupes économiques les plus puissants abreuvent le Conseil constitutionnel de notes et multiplient les rencontres pour protéger leurs intérêts. Une activité souterraine soumise à aucune règle.

Le Conseil constitutionnel et le Conseil d’Etat occupent l’espace laissé vacant par la faiblesse de l’exécutif et du Parlement.

La décision "Liberté d'association" rendue le 16 juillet 1971 marque une étape fondamentale dans l'affirmation du Conseil constitutionnel. Comment cette institution, qui devait veiller avant tout à ce que le Parlement n'empiète pas sur les prérogatives du pouvoir exécutif, est-elle devenue la gardienne des libertés fondamentales ?

L'institution a récemment intégré trois nouveaux membres au titre de son processus de renouvellement triennal. L'occasion de revenir sur l'histoire des "sages" de la rue de Montpensier.

Méconnu, il intervient dans tous les domaines de la vie publique. Plus indépendant à l'égard du pouvoir politique qu'à sa création, il est en revanche soumis à une pression croissante du monde économique.

Depuis quelques jours, la controverse enfle, qui interroge sur le fonctionnement même de notre République. "L'Express" veut alimenter la réflexion. L'entretien se conclut par deux tribunes, celle du sénateur LR Philippe Bas intitulée "Loi immigration : la démocratie bafouée" et celle de Bernard Cazeneuve, ancien premier ministre "Quand l'Etat de droit vacille".

En censurant 35 mesures de la loi Immigration, les juges de la Rue de Montpensier ont confirmé leur intention de jouer un rôle politique. Et ont offert des arguments à ceux qui voient de l'idéologie dans leurs décisions.

La colère populaire suscitée par la perspective de deux années de travail supplémentaires autant que par le passage en force de l’exécutif marque un tournant. Abîmé par des gouvernements s’étant fixé pour but le bonheur des actionnaires, le crédit accordé par la population au monde politique s’est effondré. N’a-t-il pas abdiqué sa mission au point de faire dépendre la vie de millions de travailleurs d’une décision du Conseil constitutionnel. Quand le mépris des gens ordinaires tient lieu de boussole, les dirigeants savent alimenter deux types de réactions : la résignation ou la révolte.

Le 25 janvier dernier, le Conseil constitutionnel français a censuré partiellement la loi dite « immigration ». La droite a dénoncé le « gouvernement des juges ». La gauche a pu saluer une victoire. Syndicats et associations ont vécu cela comme un soulagement. Mais cette décision met surtout en évidence la soumission du Conseil à l’exécutif, et une démocratie de pacotille.