La lutte d'influence entre l'Etat et l'islam ne date pas d'hier, comme le rappelle l'éclairage d'un éminent intellectuel. Mais le modèle, imposé par Atatürk est usé.

Il a été Premier ministre, puis ministre des Affaires étrangères, avant d'assumer la charge de président de la République turque au terme d'une élection mouvementée. C'est dire si ce quinquagénaire, proeuropéen tout en étant issu de la mouvance islamiste, connaît les arcanes politiques et diplomatiques.

La camp laïc s'oppose massivement à l'éventuelle élection d'un président islamiste. Et récuse tout autant une intervention de l'armée.

Dernière péripétie de la lutte sans merci engagée entre l'armée et le gouvernement islamo-conservateur : une procédure d'interdiction visant l'AKP, le parti au pouvoir.

En échappant de justesse à l'interdiction, le parti islamo-conservateur au pouvoir a remporté une bataille dans son interminable bras de fer contre l'armée et l'establishment laïc. Et maintenant ?

En se braquant sur la seule défense du voile, au détriment des questions cruciales, le parti au pouvoir s'isole de la société, explique un intellectuel turc.

Il est absurde d'affirmer que la Turquie tomberait dans l'islamisme radical si l'Europe la repoussait. Car toute l'histoire du pays montre que son évolution va dans l'autre sens.

Venus pour défendre la laïcité, des centaines de milliers de Turcs ont fini par verser dans un nationalisme inquiétant en conspuant tour à tour l'UE, les Etats-Unis et le FMI, note le quotidien Milliyet.

Depuis un mois, la rue turque est en ébullition pour défendre la laïcité. L'AKP a voulu présenter l'un de ses membres à la présidence. Faute de quorum, cette élection a été invalidée. Dans cette crise où l'armée joue un rôle, les vrais démocrates ne sont pas toujours du même côté.

L'opposition laïque accuse Gl de vouloir islamiser l'Etat. Pour "Vatan", le quotidien de la gauche libérale, le futur président est au contraire susceptible de réconcilier les conservateurs religieux avec la République.

Le 22 juillet 2007, les Turcs se rendent aux urnes pour élire leurs députés. Les islamistes modérés au pouvoir semblent favoris. L'opposition laïque doit envisager une alliance avec l'extrême droite pour offrir une alternative.

En avril 2007, trois chrétiens étaient assassinés dans l'est du pays. Mais, curieusement, le procureur chargé du dossier se focalise sur les "provocations" commises par les missionnaires. Une dérive qui en dit long sur l'état de la laïcité en Turquie.