Depuis près de trois décennies, le Tchèque Petr Vaclav tourne des films, mais ils ne semblent nous parvenir qu'au compte-gouttes. Il avait été remarqué dans nos colonnes dès son premier long métrage, "Marian" (1996), « un film brillant, porté par la révolte d'un cinéaste qui a des comptes à régler », selon Françoise Audé. Ce n'est qu'une vingtaine d'années plus tard que Jean-Dominique Nuttens salua "Zaneta" (2014), « ce beau film sombre ».

Sans crier gare est apparu sur le grand écran un des meilleurs films policiers de ces dernières années, depuis "La Loi de Téhéran" ("Metri shesh va nim", 2019) de Saeed Roustayi, et le meilleur polar américain depuis des lustres, peut-être depuis "Mystic River" (2003) de Clint Eastwood. Ce film est d'autant plus inattendu qu'il marque la première incursion hollywoodienne de l'Argentin Damian Szifr6n après son remarquable "Les Nouveaux Sauvages" ("Relatos Salvajes", 2014).

Adapter au cinéma la vie d'un des cinq plus grands chefs d'orchestre du XXe siècle, compositeur majeur, professeur de musique hors norme, celui qui fit entrer, grâce à la télévision, la musique classique dans des dizaines de millions de foyers américains et au-delà, filmer la vie de Leonard Bernstein, dit Lenny, apparaissait comme un défi tant sa personnalité publique était perçue comme la générosité même.

Est-ce onirique ou surréaliste ? Dans le compartiment d'un train, une femme agitée portant des lunettes de soleil, sous les traits de Nicole Garcia, semble plongée dans de grands tourments intérieurs. La lumière du jour blafarde qui défile à travers la vitre au ralenti rend la scène irréelle, comme issue d'un rêve ou plutôt d'un cauchemar. Face à la femme, une petite fille. Soudain, l'adulte commet un impensable interdit et poignarde la main de l'enfant. Dans la scène suivante, un insert sur une main montre la marque d'une large cicatrice.

Cette 80e édition de la Mostra ne s'adressait pas aux rabat-joie et encore moins à celles et ceux qui continuent de confondre avec une stupidité éhontée la critique d'une oeuvre artistique avec un tribunal de la rue décrétant que tel cinéaste doit désormais être proscrit. Comme l'a si bien rappelé Alberto Barbera, courageux directeur artistique de la Mostra, un festival international de cinéma existe pour juger les films et non les hommes. Le compte-rendu se conclut par l'article intitulé "Au Lido, on achève bien sa mue".

L'occasion est trop belle de profiter de cette période de crise de l'exploitation cinématographique pour mettre en avant les séries au détriment des films faits pour les salles. Mais l'occasion est aussi trop belle de rappeler quelques valeurs cinématographiques que les séries, même cosignées par de grands cinéastes, n'arrivent pas à intégrer.

L'humanité a été plongée cette année dans une tragédie qui a atteint toutes les populations du globe, cachées derrière des masques, subissant le confinement, expérimentant les gestes barrières et la vie dématérialisée. Etrange paradoxe, tout en nous rassemblant dans un même combat, le coronavirus nous séparait par la fameuse "distanciation sociale", ce qui fit écrire au presque centenaire Edgar Morin : "Le virus nous rappelle à notre humanité et à notre condition d'êtres profondément sociaux, inséparables les uns des autres". Sommaire. Nos écrans suspendus ; Cinéphiles en exil.

Il faut saluer le courage et la ténacité du directeur de la Mostra, Alberto Barbera, du président de la Biennale de Venise, Roberto Cicutto, et de leur équipe, d'avoir réussi à maintenir la 77e édition de ce grand festival international de cinéma en période de pandémie, après les annulations de Canne et de Locarno.

Avec neuf films en trente ans, Nicole Garcia n'a cessé, depuis ses débuts de réalisatrice ("Un Week-End sur deux", 1990), de solliciter notre attention sous la forme de longues critiques et d'entretiens. Comédienne accomplie, elle a été à l'école des meilleurs, Tavernier, Resnais, Sautet, Deville, Miller, Doillon et tant d'autres, et a pu observer sur les plateaux le travail des metteurs en scène avant de passer elle-même derrière la caméra.

Faut-il envisager le nouveau long métrage de Benoit Jacquot comme une "Comédie humaine des actrices" ? Doit-on tenir compte du passé filmographique de Charlotte Gainsbourg dans l'oeil du réalisateur de "3 Cœurs" (2014) ?

Le cinéaste Adam McKay donne à voir le parcours de l'homme politique américain Dick Cheney.

Huit épisodes pour filmer les transactions commerciales et l'acheminement de 5000 tonnes de cocaïne de Monterrey, au Mexique, à un village de calabre tenu par la 'ndrangheta, mafia la plus puissante au monde.

A l'image d'un train lancé à pleine vitesse, qui ne cesse ici de faire des allers-retours entre Paris et Annecy, Eva déploie la densité d'une énergie liée à l'attraction des instincts. Adaptant le roman "Eve" de James Hadley Chase paru en 1945, Benoit Jacquot déplace l'intrigue hollywoodienne dans le milieu du théâtre français actuel et renoue avec le pari cinématographique d'une de ses plus belles emprises amoureuses, réalisé dans Adolphe (2002) : la passion d'un jeune homme pour une femme plus âgée.

Il y a au bout de quelques minutes de ce blockbuster une inquiétude qui peut s'emparer des spectateurs les moins au fait de la culture des jeux vidéo, face au déluge d'effets spéciaux exclusivement numériques, à la consistance froide, qui réduit la mise en scène à une course-poursuite vertigineuse mêlant vitesse, pyrotechnie, destructions de plateformes par des monstres en tout genre...

A l'heure où ces lignes sont écrites, le sort de "L'Homme qui tua don Quichotte" est loin d'être scellé. Suspendu à une décision judiciaire à la suite d'une bataille de droits entre le producteur Paulo Branco et le cinéaste Terry Gilliam qui a rompu son engagement avec le premier, le film, à quatre jours de l'ouverture du festival de Cannes, n'est toujours pas certain de pouvoir clôturer la manifestation et d'être exploité en salles deux semaines plus tard.

Comme l'écrivait le "Corriere della Sera" la veille du palmarès, le seul gagnant de cette Mostra dont on soit sûr est Alberto Barbera, son directeur artistique qui, depuis quelques années, a relevé le niveau de cette manifestation. Il est parvenu, cette année, à signer une édition d'une réelle qualité due, en partie, à une forte sélection américaine - sept films sur vingt et un en compétition - si l'on inclut "The Shape of Winter" du Mexicain Guillermo del Toro et "The Leisure Seeker" de l'Italien Paolo Virzi, tournés aux Etats-Unis avec des comédiens anglo-saxons.

Pour son retour au grand écran, Steven Soderbergh signe à première vue un divertissement qui pourrait être une version déclassée d'"Oceans Eleven" (2001), où la bande bling-bling de la célèbre franchise a été remplacée par une galerie de personnages qui représentent l'Amérique moyenne et bien moins. Pour faire court, ils pourraient appartenir à l'électorat de Donald Trump ou à cette majorité silencieuse que convoitait Richard Nixon.

"Positif" avait déjà rencontré Mathieu Amalric pour l'interroger sur son métier d'acteur et sa collaboration avec Alain Resnais (no 615 p.101). L'opportunité, hélas, ne s'était pas présentée d'échanger autour de ses réalisations ("Le Stade de Wimbledon", "Tournée", "La Chambre bleue") dont nous avions apprécié l'inspiration romanesque, la liberté de ton et une manière de sincérité à vif. C'est chose faite aujourd'hui à l'occasion de la sortie de "Barbara" auquel le jury d'Un certain regard a attribué le Prix de la poésie du cinéma et qui a obtenu le prix Jean-Vigo.

Avec "Alien : Covenant", Ridley Scott établit la jonction narrative entre "Prometheus" (2012) et "Alien" (1979). Il y dévoile la naissance biologique et physiologique du monstre mythologique, mais pour tout dire ne parvient plus à étonner.

Auréolé des succès internationaux publics et critiques du "Silence des agneaux" ("The Silence of the Lambs", 1991) et de "Philadelphia" (1993), Jonathan Demme a embrassé une carrière qui a touché toute l'industrie cinématographique, du film indépendant à celui de studio en passant par le documentaire.

Régulièrement, le cinéma hollywoodien s'inquiète des dangers qui pèsent sur la démocratie états-unienne. "Amsterdam", par le biais d'une comédie politique, perpétue cette préoccupation face à la recrudescence, depuis six ans, d'une idéologie postfasciste au sein du peuple et des institutions les plus importantes. La dernière réalisation de David O. Russell ne s'apparente pourtant ni à un réquisitoire anti-Trump ni à un film de propagande prodémocrate.

Présenté en compétition à la Mostra de Venise 2021, "Le capitaine Volkonogov s'est échappé" offre une splendide leçon de cinéma, mêlant la fièvre épique et le picturalisme flamboyant au thriller moral. En Russie, l'oeuvre aurait pu valoir à son interprète principal, Youriy Borisov, découvert dans notre pays pour ses rôles dans "Compartiment no 6" (Juho Kuosmanen) et "La Fièvre de Petrov" (Kirill Serebrennikov) des triomphes similaires à celui de "Kalachnikov" (de Konstantin Buslov, inédit en France), une année plus tôt.

Tim Burton, cinéaste star, montre encore et toujours sa foi dans le cinéma, malgré la pression toujours plus grande des 'majors' à plateforme comme Disney+ ou Netflix, tellement séduites par son style. Avec Warner, il revient à la source de sa filmographie en réalisant une suite de "Beetlejuice" (1988). Ce deuxième long métrage, après le remarqué "Pee-wee's Big Adventure" (1985), l'avait propulsé auteur à part entière.